Le groupe de Mokhtar Habbachi à Teboulba veut porter l’étendard d’une ville qui ne compte pas parmi les grands centres urbains du pays mais pour laquelle il entend bien lui faire jouer un rôle important sur la carte automobile nationale en proposant une complémentarité entre les services : vente, entretien et formation.
Sa première pierre a été posée en 2000 avec l’ouverture d’un centre Bosch Car Service, d’où a découlé plus tard une école de formation, puis une agence agréée de vente de véhicules neufs. La conversion inédite du fondateur du groupe, littéraire de formation et technique de profession, rend son parcours encore plus original. Aidé par son dévouement et sa passion pour l’automobile, il compte aujourd’hui parmi les fin-connaisseurs des rouages du secteur pour lequel il a une vision d’avenir toute tracée. Interview.
Vous dirigez actuellement un groupe d’entreprises opérant dans l’automobile, dites-nous-en plus sur votre parcours ?
Le secteur de l’automobile me tient à cœur, c’est pour cela que je m’y suis lancé et tenté ma chance. L’aventure a débuté avec la mise en place d’un centre Bosch Car Service en vue de répondre aux besoins en services et en entretien pour les automobilistes de la région. Teboulba était un choix naturel pour mes projets d’investissement pour ce qu’elle représente pour moi et parce qu’elle possède une dynamique économique importante justifiée par la diversité d’activités : agriculture, industrie, textile et maritime.
Tous ces facteurs contribuent à améliorer le pouvoir d’achat de ses habitants en comparaison avec d’autres régions du pays et offrent un extraordinaire levier pour qu’un business automobile puisse y prospérer. Ce premier projet a constitué mon ticket d’entrée dans le monde de l’automobile étant donné que ma plus grande aspiration était d’entreprendre un projet dans la formation. Un rêve qui est devenu réalité avec la création du centre Spider Training Center (STC).
Le potentiel de la région permettant de voir encore plus grand avec la possibilité d’une complémentarité des services entre formation, entretien et vente automobile, nous avons eu l’idée d’ajouter une agence 3S agréée pour la vente et les services après-vente de la marque Toyota.
Pourrez-vous présenter le STC, sa vocation et ses méthodes de travail ?
Le STC est un centre moderne équipé de toutes les commodités et les équipements nécessaires pour un apprentissage optimal. C’est le premier complexe en Tunisie et en Afrique du Nord qui fournit des solutions End2End pour le secteur automobile dès l’initiation d’une idée de nouveau produit ou de service jusqu’à sa finalisation, en passant par les formations adéquates et requises pour tout apprenant et entrepreneur souhaitant améliorer ses compétences.
Nous préparons les élèves à devenir autonomes et des leaders capables d’apporter une plus-value au secteur. Notre structure est également orientée vers les métiers d’avenir, comme l’hybride et l’électrique. Nous œuvrons pour le positionner en tant que lieu d’innovation technologique, en favorisant le développement du savoir-faire professionnel et en privilégiant la recherche de solutions créatives. Nous aspirons, en outre, à renforcer le réseautage avec le monde socio-économique pour être en lien avec la réalité professionnelle et satisfaire aux exigences de nos partenaires.
Projets en préparation : le rétrofittage des voitures et un véhicule pour personnes handicapées.
Quels cursus de formation les apprenants peuvent-ils choisir ?
Il est important avant tout de dire que nos diplômes sont homologués et reconnus par le ministère de la Formation professionnelle. Pour intégrer le STC, l’apprenant pourra choisir entre trois cycles de formation : un CAP (certificat d’aptitude professionnelle), un BTP (brevet de technicien professionnel) ou un BTS (brevet de technicien supérieur). Le BTP, par exemple, est un diplôme obtenu suite à un parcours basé sur une expérience de terrain.
Des techniciens expérimentés optent pour ce cursus afin de promouvoir leurs compétences auprès de clients et d’employeurs potentiels. Les spécialités proposées sont la mécanique et l’électricité automobile. J’ajoute qu’un technicien en mécanique et électricité automobile diplômé de notre centre est capable de maintenir et dépanner les véhicules automobiles, d’autant plus qu’il a l’aptitude de procéder au diagnostic, à la remise en état et à la réparation des composants et des systèmes mécaniques, électriques et électroniques.
Le « complexe » automobile couvre une superficie totale de 6000 m2.
Par ailleurs, les personnes qui souhaitent consolider leur expérience professionnelle peuvent obtenir un BTS. C’est également un parcours basé sur des épreuves pratiques et l’intégration en milieu professionnel. Le but est de former des étudiants immédiatement opérationnels, capables d’adhérer directement dans le domaine du travail. Les spécialités assurées sont la maintenance et l’après-vente automobile.
Quelle démarche suivez-vous pour assurer aux apprenants une formation à jour orientée vers les nouveaux métiers de l’automobile ?
L’amélioration de nos méthodes de travail est un exercice au quotidien dans notre centre. Nous faisons appel, par exemple, à des formateurs étrangers qui nous accompagnent dans cette démarche. Nous avons invité dernièrement, dans le cadre d’une coopération tuniso-allemande, Karl Leitenberger et Wolfgang J. Saier, deux experts seniors allemands en éducation dans le secteur automobile pour aider nos apprenants à améliorer leur niveau de compétence à travers des workshops et des formations sur le moteur à combinaison en hybride et électrique et offrir un encadrement à nos formateurs.
De plus, nos formateurs suivent des formations continues à distance avec leurs homologues étrangers.
Dans ce même contexte, je dois souligner l’apport de la GIZ qui nous a aidés dans le cadre d’une collaboration qui date depuis 2019 à la mise en place du STC selon les standards allemands. Dans le souci d’élever la qualité aux standards internationaux, nous travaillons également pour certifier le centre aux normes ISO.
Quel cadre offrez-vous aux apprenants ?
Nous avons déployé un cadre d’apprentissage agréable et convivial orienté vers la jeunesse. Nos salles sont baptisées du noms de personnalités ou de marques localement ou mondialement connues à l’instar de Robert Bosch et de Wallyscar.
L’idée est de montrer la voie de la réussite à nos élèves à travers de bons exemples ayant contribué à innover et révolutionner le monde de l’automobile. Les enseignants sont des ingénieurs de formation.
Le STC compte 120 apprenants.
Ensuite, nous avons mis à leur disposition des espaces où pratiquer des activités stimulant la réflexion stratégique. Nous avons, par exemple, organisé une compétition d’échecs où notre club a eu l’occasion de concourir contre leurs homologues de la région.
C’est à l’atelier où les apprentis mettent en pratique leurs connaissances acquises lors des épreuves théoriques. Nous ne lésinons pas sur les investissements pour leur fournir des moyens et des outils très pointus à l’instar de la machine de diagnostic de la marque Bosch, FSA 740. Nous les incitons ainsi à développer leurs idées, à les concrétiser et à les expérimenter dans des situations réelles. Dans cette optique, nous proposons de réparer gratuitement les voitures des personnes qui le souhaitent. Il suffira d’acheter les pièces à changer pour que nos apprenants les remplacent sous le contrôle de l’un de nos techniciens.
Nous voulons faire du STC un laboratoire d’idées où celles-ci naissent, prospèrent et se concrétisent. Parmi les autres skills que nous essayons de développer chez l’apprenant, ce sont les langues pour qu’elles ne soient pas un frein à son apprentissage.
Nous voulons faire du centre STC un laboratoire d’idées pour le secteur automobile. »
L’automobile est souvent considérée comme un métier exercé par des hommes. Quelle place occupe la femme dans votre projet ?
La femme est une pièce maîtresse dans notre centre. Elle y occupe des postes-clés. La direction du centre est d’ailleurs assurée par une femme, Wejden Habbachi. Cela veut dire que les femmes sont capables autant que les hommes de maîtriser ce secteur et d’y exceller.
Plus d’éclaircissement sur les prochains projets en préparation ?
Le premier projet sur lequel nous travaillons actuellement est le rétrofittage. Cette opération consiste à électrifier une voiture thermique en retirant son moteur et son réservoir et les remplacer par un moteur électrique et une batterie. C’est l’un des projets de fin d’études de nos élèves. Un kit de rétrofit est d’ailleurs en cours d’acquisition dans l’ambition d’introduire cette activité en Tunisie, sachant qu’elle fait sensation en Europe et en France qui accorde une subvention aux personnes qui souhaitent rétrofiter leurs voitures.
Nous sommes en discussions actuellement avec le directeur de l’ANME pour avancer sur ce sujet. Nous cherchons, d’abord, à préparer le terrain avec l’acquisition du kit de rétrofit et le développement de la formation et à trouver un cadre juridique adéquat.
C’est un projet important vu que la moyenne d’âge de notre parc automobile s’élève à 15 ans, alors que le monde va progressivement vers l’hybride et l’électrique. C’est une piste pour accélérer l’électrique, le processus de décarbonation et la baisse des émissions en CO2.
Un deuxième projet est en phase de préparation et consistera à construire une voiture électrique au profit des personnes handicapées. Elle va leur offrir une autonomie totale pour l’utiliser et la conduire sans besoin d’aucune assistance.
Sur un autre plan, nous venons d’acquérir le support Electude, un outil de formation extraordinaire et une solution d’apprentissage très développée. Nous prévoyons, en outre, d’introduire la formation aux métiers maritimes dans une prochaine étape.
Le 3e maillon de la chaîne est l’agence Mec-Art. Comment les choses se passent-elles depuis son inauguration récente ?
L’agence Mec-Art, en partenariat avec la marque Toyota, couvre une superficie de 2000 m2. La dénomination est inspirée d’un secteur de plus en plus artificiel et artistique. Nous voulons accorder, dans ce projet, plus d’importance au service après-vente.
Les ateliers sont donc équipés de 5 ponts élévateurs et dotés d’un stock important de pièces de rechange afin de répondre rapidement aux besoins des clients. Nous avons choisi TotalEnergies en tant que partenaire pour les lubrifiants. Cette collaboration va nous permettre d’ouvrir de nouveaux horizons dans d’autres domaines comme le maritime et l’industriel.